Eglise

Pourquoi rester dans une Eglise en déclin ?

L’Eglise Protestante de Genève est en train de couler. Ce n’est pas nouveau. Ce n’est pas du pessimisme. C’est un fait. Si dans les années 50 plus de 50% de la population genevoise se reconnaissait protestante réformée, ce chiffre est aujourd’hui plus proche des 9%. La courbe de progression est stable sur les 60 dernières années, et rien ne semble pouvoir l’arrêter. Alors pourquoi persister à rester dans une institution dont le destin semble scellé ?

Paul nous encourage à rester

Paul nous encourage à rester dans nos assemblées, à ne pas les abandonner quand les choses deviennent difficile.

N’abandonnons pas notre assemblée, comme c’est la coutume de quelques-uns, mais exhortons-nous mutuellement, et cela d’autant plus que vous voyez le Jour s’approcher.

Hébreux 10:25

Les raisons qui pourraient pousser quelqu’un à quitter une Eglise pour une autre peuvent être multiples. Il peut s’agir de raisons théologiques (« Je ne suis pas en accord avec certains discours »), démographiques (« Nous sommes la seule famille »), relationnelles (« Je ne m’entend pas avec telle personne »), etc. Ces problèmes ont été rencontrés par les premières communautés chrétiennes au sein desquelles se retrouvaient soudainement mis ensemble aussi bien des chrétiens d’origine juive que des chrétiens d’origine païenne, avec des pratiques, des histoires, des manières de lires des textes bibliques, des cultures différentes, etc. Immanquablement, cela créé des tensions, et certains étaient alors tentés de quitter la communauté. Mais Paul encourage encore et encore les communautés à maintenir la cohésion autant que possible (Rm 12:16, 15:6 / 1 Co 1:10, 12:25 / 2 Co 13:11 / Ephésiens 4:3 / Philippiens 1:2, 2:2, 4:2 / Col 2:2)

L’Eglise est aussi un lieu de mission

La mission n’est pas que dirigée vers l’extérieur. Elle peut, et doit, également être vécue à l’intérieur des institutions existantes. Si l’Eglise Protestante de Genève est sur le déclin, c’est – en partie – parce qu’elle a perdu sa capacité à évangéliser, non seulement ceux du « dehors » mais également ceux qui sont déjà « dans » l’institution. Il est donc vital que nous restions en son sein (cela est valable pour l’EPG mais également pour n’importe quelle institution en difficulté) et considérions l’Eglise comme lieu de mission, et pas uniquement comme origine de la mission.

L’Eglise parfaite n’existe pas

L’institution Eglise est exactement cela, une institution, composée d’hommes et de femmes avec leurs défauts et leurs richesses. La tentation est grande de vouloir trouver l’Eglise ou la communauté parfaite. Quand nous disons cela, nous disons chercher une communauté qui ne nous remettra pas en question, qui répondra exactement à mes besoins (ou ce que je perçois comme étant mes besoins). Et si par malheur je venais à trouver une telle communauté, alors ce serait un échec. Ce serait un échec parce que l’Evangile a une nature subversive. Parce que la vie dans et en vue du Royaume nous invite à toujours vivre en dehors de nous-même. L’Evangile nous déplace, nous dérange. Alors une communauté ou Eglise qui ne nous dérangerait pas ne serait pas une communauté évangélique (au sens de fidèle à l’Evangile). Lorsque je trouve l’Eglise parfaite, elle devient alors immédiatement imparfaite.

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Pasteur dans l'EPG, je partage ici diverses réflexions, prédications et expériences, en espérant créer la discussion afin que nous puissions nous enrichir mutuellement.

6 Comments

  • Plume

    Bonjour Philippe,

    je distingue deux Eglises, une spirituelle, faite de tous les chrétiens qui reconnaissent Le Christ comme Seigneur et la bible comme texte fondateur de la foi, le Corps du Christ (c’est dans cette Eglise que je me reconnais, avec sa diversité de croyances, de forme liturgiques et de spontanéité) et une autre institutionnelle, avec des structures, ses synodes, des manières de faire, de dire, de penser la foi. C’est la deuxième que je fuis à toutes jambes. Son imperfection ne doit pas être une excuse.
    L’église protestante ( de quelque canton elle soit) en tant que telle a une finitude puisque dans son essence même elle doit séculariser (j’aime beaucoup mieux le terme féconder) la société. Chacun est appelé à lire et interpréter, au plus près de sa conscience, les Evangiles. Notre société a repris à son compte pas mal de valeurs évangéliques, le soins et l’assistance aux plus faibles, l’éducation de tous, une forme d’éthique du Bien commun, via cette identité protestante.

    Néanmoins, son silence à travers les remous et les crises est condamnables. Ce ne sont pas les églises qui ont mis en avant le mariage pour tous, qui n’ont pas dénoncer fortement la globalisation, la destructions des conditions de travail sous prétexte de libéralité. Pas un mots sur la préservation de la nature depuis 30 ans, on ne prêche pas la dessus, sur l’immigration c’est à peine mieux, on accueille du bout des lèvres quelques personnes dans nos églises-refuge. Mais ils sont où ces chrétiens qui s’habillent d’Evangile le dimanche ? Ils sont où ces chrétiens dans le monde politique, ceux qui se revendiquent comme tel ? Ces chrétiens dit évangéliques qui votent à droite pour ne pas dire l’extrême droite !

    Oui L’Eglise institution est imparfaite, mais ce n’est pas une excuse. Son silence est bien trop souvent assourdissant !

    Quitter une institution, une communauté ecclésiale ne veux pas dire, loin s’en faut, quitter sa foi et son espérance. Cela veut simplement dire non seulement vous faites fausse route et ce depuis les années 60 du siècle derniers, mais dans votre forme actuelle (remarquez que je ne remets pas en cause la foi de cette institution), vous êtes condamné à mourir et à ressusciter à l’exemple de votre Maître. Encore que dans la mort du Christ certains y voient un sacrifice.

    Au plaisir de lire de nouveaux articles !

    • Philippe Golaz

      Merci Plume de votre commentaire. En effet, le fait d’être imparfaits ne doit pas être une excuse. Paul irait certainement dans ce sens. « Que dirons-nous donc ? Demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde ? Certes non ! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore dans le péché ? » (Romains 6:1-2)
      Mais je ne dirais pas que l’Eglise-institution est silencieuse sur ces questions de société. Je dirais même au contraire qu’elle a eu un peu trop tendance à se laisser ballotter de gauche et de droite en cherchant à être politiquement correcte. Les questions que vous soulevez sont justement les thèmes principaux sur lesquelles l’institution fait campagne, cherchant désespérément à donner l’image d’une institution pertinente.
      Et si nous trouvons des chrétiens dans le monde politique avec un engagement cohérent vis-à-vis de leurs valeurs chrétiennes, ce ne sont malheureusement que très rarement réformés.

  • Henri Bacher

    Le problème du déclin de nos communautés chrétiennes, de tout bord, n’est pas, avant tout, un problème
    de positionnement doctrinal ou spirituel, mais c’est un problème de culture. Lorsqu’on a envoyé des missionnaires
    dans l’hémisphère sud, on a pris soin de les former à transmettre leur message dans la culture des personnes qu’ils veulent atteindre.Cette culture est d’abord liée à la langue, mas pas seulement. C’est beaucoup plus large. Le protestantisme et par ricochet les réveillés du 19ème siècle, dont sont issus les différents mouvements dits « évangéliques », sont des fils et des filles de la culture de l’école. Le succès des Calvin, Luther, Bucer, Zwingli, c’est qu’ils sont montés dans le train de la Renaissance, la culture montante. Aujourd’hui, nos églises classiques sont arrimées à la culture de l’école, issues de la Renaissance, même si la généralisation du système scolaire est venue beaucoup plus tard. Prenez tout simplement le vocabulaire utilisé dans le cadre de l’église, le pasteur enseigne, les enfants vont à l’école du dimanche, on lit beaucoup, on écrit des livres, on analyse le texte biblique *
    Le problème, c’est une culture « descendante » en face d’une culture « montante » qui est liée à l’oralité électronique.
    Il faudra repenser théologiquement la manière de vivre la communauté, d’organiser la liturgie, l’appel à suivre le Christ. Dans une culture « païenne » occidentale peut-on encore évangéliser nos concitoyens à travers un culte? Ils ne connaissent plus le vocabulaire, puisqu’ils ne sont plus catéchisés. Le culte, c’est du « chinois » pour eux.
    Alors vous pouvez toujours rester dans votre communauté et comme disait le pasteur réformé vaudois Maurice Ray,
    « il faut bien des pasteurs qui accompagnent les mourants ».Pourtant, mon conseil, ce n’est pas de quitter votre communauté, mais de commencer des activités à côté de l’ancienne manière de faire église tout en soignant les « mourants ». Et prenons l’exemple de nos Réformateurs. Ils ont commencé par restructurer l’activité catholique de l’époque et ils ont « sabré » dans le vif. Aujourd’hui, nous avons besoin de revenir à une activité de type ecclésial
    qui n’est pas structurée par une liturgie. Il faut revenir, a ce qui s’est fait au début dans les Actes: manger ensemble, prier les uns pour les autres, prendre soin les uns des autres, se laisser guider par le Saint Esprit pour accomplir des miracles.
    Les maîtres mots sont simplicité, authenticité, partage informel (non basé sur une structure liturgique).
    Ce qui manque dans nos églises, c’est des laboratoires de recherche comme dans les grandes entreprises.
    Des expérimentations qui ne se font pas dans le cadre d’un bâtiment d’église, mais dans les « champs », au bord du « lac ».
    On est encore dans la logique de la rénovation, alors que le monde marchand nous donne un exemple intéressant.
    Steve Jobs, Bill Gates ne sont pas partis d’une entreprise existante pour se développer.
    Ils ont commencé dans des « garages ». Ils sont où, nos garages?

    * Même si j’écris (encore), je passe plus de temps à créer des clips vidéo

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