Prédications

La vraie liberté

Lecture biblique : Romains 6:1-18

Une liberté qui enferme

Parmi les désirs, les attentes, les valeurs cardinales de l’occident moderne, on trouve celle de liberté. Chacune et chacun rêve de liberté, de toujours plus de liberté. Le marketing l’a bien compris. Les entreprises de toutes sortes utilisent cet angle d’attaque pour nous faire adopter leurs produits. On repousse toujours plus les limites. On veut pouvoir téléphoner sans limites, voyager sans limites, dépenser sans limites, skier sans limites. Sans limites et sans contraintes. Et ce modèle de marketing cartonne parce qu’aucun de ces produits n’est capable de satisfaire notre soif de liberté sur le moyen ou long terme. Soit nos vacances prennent fin, soit nous atteignons rapidement de nouvelles limites que nous demandons alors à pouvoir repousser ou dépasser.

Le prix de la liberté

Et à chaque fois, ces libertés ont un coût, et c’est à nous de les assumer. Tu veux plus de liberté avec ton smartphone ? Alors il te faut soit en acheter un nouveau, soit souscrire un abonnement plus cher ! Plus de liberté dans tes vacances ? Il te faudra partir plus loin ou prendre un hôtel avec plus d’étoiles, et donc plus cher aussi. On se heurte alors aux limites de nos finances, et on rêve de plus d’argent pour pouvoir enfin être libre. C’est l’acteur Jim Carrey qui a dit qu’il voudrait que tout le monde puisse être infiniment riche, afin que chacun puisse se rendre compte que cela ne suffit pas. Que même là, notre soif de liberté n’est pas satisfaite. Car à chaque étape, nous nous rendons prisonniers de quelque chose d’autre. Nous serons toujours prisonniers de quelque chose de plus grand que nous. L’argent, le pouvoir, la réputation, notre apparence, etc. 

On retrouve la même logique dans notre rapport à notre corps. Nous voulons être libre de faire ce que l’on veut avec son corps. On milite pour une totale liberté dans nos manières de vivre nos sexualité, nos relations, d’habiter et d’exprimer ce que nous comprenons comme notre identité qu’elle soit ethnique, politique, de genre ou sociale.

Des désirs désordonnés

On peut résumer ainsi : nous vivons tous pour quelque chose qui vient donner un sens et de la valeur à nos existences. Ces choses deviennent nos maîtres spirituels. 

C’est ce dont Paul parle au verset 12 quand il nous encourage à ne pas obéir aux convoitises de nos corps mortels. Le mot grec qui est traduit ici par « convoitise » est ΕΠΙΘΥΜΙΑ (epithumia) où le petit « épi » est une particule qui signifie l’excès. Littéralement : un désir désordonné pour de bonnes choses. C’est lorsque nous donnons trop d’importance à quelque chose qui en soi est bon. Car tout ce que j’ai mentionné au début sont de bonnes choses en soi.

Trois tests

Je vous propose trois tests pour nous aider à savoir si nous avons une relation excessive à quelque aspect de nos vies.

Colère

Si nous sommes empêchés d’avoir quelque chose de bon, nous sommes fâchés. Mais si cette chose est une chose « ultime », nous sommes « epi » fâché, nous entrons dans une colère noire.

Peur

Si quelque chose de bon est menacé, nous sommes inquiets. Mais si cette chose est sur-investie, nous sommes alors terrifiés. Paralysés par la peur.

Tristesse

Si nous perdons quelque chose de bon, nous en sommes attristés. Mais si cette chose est une chose ultime pour nous, nous nous retrouvons alors atterrés, incapables de vivre.

Si nous réagissons de manière excessive à la perte, la menace ou l’empêchement d’avoir une chose qui est bonne, c’est que nous avons un rapport déréglé à elle. Et si nous suivons aveuglément les désirs de notre coeur, si ce que nous cherchons c’est la liberté de suivre nos désirs, non seulement nous ne serons jamais satisfaits, mais nous nous éloignerons toujours plus de Dieu.

Le fils qui voulait être libre

Jésus raconte une parabole qui peut nous aider à comprendre cela. C’est la parabole du fils prodigue, ou des deux fils.

Un homme avait deux fils. Le plus jeune se dit : « je veux être libre de faire ce que je veux, comme je le veux et quand je le veux. » Il demande alors à son père sa part d’héritage et s’en va. Il dilapide son argent à satisfaire les désirs de son coeur et se retrouve rapidement sans argent. Il se met alors au service d’un éleveur de porcs. Je vous rappelle que Jésus parle dans un contexte juif, où le porc est un animal impur. Ce maître n’est pas un bon maître car il traite les animaux mieux qu’il traite ce jeune homme. Il décide alors de retourner chez son père pour le supplier de le prendre comme serviteur, car il sait qu’il sera bien traité là-bas. Mais le père le reçoit non pas comme serviteur, mais comme fils, et l’installe à nouveau dans sa place de fils avec tout ce que cela implique.

On peut alors imaginer une suite à l’histoire, en regard de Romains 6

Imaginons qu’après quelques temps chez son père, il souhaite à nouveau satisfaire les désirs de son coeur, et reparte profiter de quelques semaines ou mois de liberté en se disant : de toute façon, je serais reçu avec joie par mon père lorsque je reviendrai. On se dirait que ce jeune homme n’a vraiment pas les yeux en face des trous et qu’il ne réalise pas qu’il a tout intérêt à rester avec son père. 

C’est ainsi que l’on peut parfois raisonner avec Dieu. Car après tout, Dieu fait grâce, il pardonne, il nous aime. Alors je peux bien être libre de faire ce que je veux, de suivre mes désirs, car Dieu me recevra de toute façon. Et je n’ai pas à me sentir coupable de vivre comme je l’entend, moi

Libres de nos esclavages

A cela, Paul répond en Romains 6 que Dieu fait plus que nous libérer de la culpabilité ou de la condamnation. Il nous libère du pouvoir du péché, il nous libère du pouvoir de ces maîtres spirituels que nous avons pu nous donner. Paul utilise ici le vocabulaire de l’esclavage. 

Il ne faut pas s’imaginer ici l’esclavage moderne. Dans l’antiquité, lorsque quelqu’un avait trop de dettes, il pouvait librement se constituer esclave afin d’être libéré de sa dette. Et quand la dette était considérée compensée, il était à nouveau libre. Et donc, lorsqu’un esclave était racheté, à savoir lorsque sa dette était payée, il aurait été absurde qu’il continue à servir son ancien maître et qu’il continue à se comporter en esclave alors même qu’il avait été libéré. Un homme libre n’a pas à se comporter en esclave.

Liberté et mensonge

Pourquoi alors est-ce que nous continuons à nous comporter et à vivre comme si nous étions encore esclaves de nos anciens maîtres, alors même que nous en avons été libérés ? Pourquoi résistons-nous à l’idée d’être serviteurs de Dieu ? 

Il y a quelque chose en nous qui résiste à cela, qui résiste à ce que nous devenions serviteurs de Dieu. 

Quelque chose en nous dit que si nous nous offrons à Dieu, alors il abusera de nous, comme l’ont faits les autres maîtres spirituels auxquels nous étions soumis. Cette voix nous dit que c’est même bien plus dangereux, car les maîtres de ce monde ont un pouvoir limités sur nous, on a en tout cas l’impression de pouvoir contrôler l’emprise qu’ils exercent sur nous. Mais Dieu ? Je sens bien que je ne peux pas exercer de pouvoir sur Lui, mais que Lui a tout pouvoir. Alors j’ai peur de perdre toute liberté, même illusoire. C’est le mensonge qui a été introduit en Eden et qui continue aujourd’hui à nous être servi sous toutes sortes de formes.

La Croix : un événement libérateur

C’est à la croix que nous découvrons la résolution de cette tension. Car à la croix, celui qui a tout pouvoir, Celui qui est maître de toutes choses, lorsqu’il voit l’humanité soumise à tant de mauvaises choses, devient lui-même serviteur. En Philippiens 2 Paul le dit en ces termes :

Que chacun de vous, au lieu de considérer ses propres intérêts, considère aussi ceux des autres. Ayez en vous la pensée qui était en Christ-Jésus, lui dont la condition était celle de Dieu, il n’a pas estimé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, en prenant la condition d’esclave, en devenant semblable aux hommes ; après s’être trouvé dans la situation d’un homme, il s’est humilié lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort, la mort sur la croix. C’est pourquoi aussi Dieu l’a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père.

Philippiens 2

Non seulement nous avons été libérés de nos anciens maîtres, mais nous n’avons même pas eu à payer le prix de cette liberté, car Dieu l’a fait à notre place. Rien de ce monde que nous adorons ne fait cela pour nous. Au contraire. Et lorsque nous nous présentons devant Dieu pour le servir, ce n’est pas en esclave qu’il nous reçoit mais, à l’image du père dans la parabole des deux fils, il nous reçoit en tant que ses filles et ses fils.

La liberté en héritage

Vous savez, il y a deux manières d’être millionaire. La première méthode c’est de travailler dure et longtemps pour y parvenir. La deuxième méthode, c’est d’épouser quelqu’un qui a travaillé dure et longtemps à cela. Cette deuxième personne devient riche par union. 

Nous pouvons travailler dure et longtemps pour atteindre la vraie liberté, mais nous n’y arriverons jamais vraiment. Nous pouvons aussi nous unir au Christ, et recevoir cette liberté en héritage. Comme le fils prodigue qui reçoit son héritage, et bien qu’il le dilapide, est réintroduit en tant que fils, dans son héritage lorsqu’il se présente devant son père avec un coeur repentant.

Cette liberté, c’est notre héritage à nous qui avons été baptisés en Jésus, à nous qui sommes morts et ressuscité avec Lui. Nous sommes des fils et des filles de Dieu, encore nous faut-il vivre selon cette nouvelle identité. Ce n’est pas tous les jours faciles. Sans cesse nous sommes tentés de revenir à d’autres maitres spirituels. Et nous avons besoin de nous rappeler que Dieu, qui est notre Père, est le seul maître à être vraiment bon. Romains 6 n’arrête pas de mélanger des affirmations sur qui nous sommes 

Nous avons été baptisés en Jésus Christ

Romains 6:3

Nous savons que notre vieille nature a été crucifiée avec lui

Romains 6:6

« vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce. »

Romains 6:14

Libérés du péché, vous êtes devenus esclaves de la justice

Romains 6:18

Et des encouragements à vivre selon notre nouvelle réalité, notre nouvelle identité :

Nous vivrons aussi avec Christ

Romains 6:8

Que le péché ne règne donc pas dans votre corps mortel, et n’obéissez pas à ses convoitises

Romains 6:12

Livrez-vous vous-mêmes à Dieu, comme des vivants revenus de la mort

Romains 6:13

C’est là toute la tension qu’expérimente le chrétien. D’un côté il se sait mort au péché et vivant pour Dieu en Jésus-Christ, et de l’autre il expérimente la tentation de vivre en dehors de Dieu sous le couvert d’une prétendue liberté.

Mais la seule vraie liberté, c’est en Dieu seul qu’elle est trouvée. En servant Dieu seul nous sommes libres de tous nos esclavages. 

AMEN

Prédication prononcée le dimanche 26 janvier 2020 à l’Eglise Evangélique de Cologny

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Pasteur dans l'EPG, je partage ici diverses réflexions, prédications et expériences, en espérant créer la discussion afin que nous puissions nous enrichir mutuellement.

One Comment

  • pepscafe

    Bonjour Philippe,

    merci pour cet édifiant message sur cet enjeu essentiel de la liberté, car là est la vie chrétienne.
    Et effectivement, la liberté dans le sens où le monde l’entend n’est pas la liberté dont Dieu parle, mais une « illusion », Etre vraiment libre, c’est être positionné du côté de Christ. Et Jésus-Christ, seul Seigneur et Sauveur, est aussi le seul homme qui a pu être véritablement libre sur la terre, tout en choisissant le contraire de la liberté que nous poursuivons avec tant d’ardeur : Il est « venu, non pour faire (sa) volonté, mais pour faire la volonté de Celui qui (l’a) envoyé »(Jean 6v38)…. « non pour être servi mais pour servir et donner (sa) vie en rançon pour plusieurs » (Marc 10v45), parce qu’il avait une libération totale à conquérir : la libération de toutes nos servitudes, y compris la crainte de l’ennemi ultime, la mort (Hébr.2v15), et la restauration des relations rompues.

    Bien fraternellement,
    Pep’s

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